Le flâneur, figure créée par Baudelaire, et savamment décrite par Walter Benjamin quelques années plus tard, pour décrire le citadin de la ville moderne, la métropole, nous semble toujours d’actualité. Créer des lieux qui s’organisent sans parcours déterminé, ni linéaire mais plutôt qui permettent d’expérimenter des états de perceptions variés (visuels, sonores, tactiles) pour retrouver une forme de rapport créatif à la ville. Permettre le flânage au visiteur pour qu’il découvre des moments, des images, des objets fabuleux, des curiosités, et par montage mental” qu’il construise sa propre histoire. Le flâneur est comme un kaléisdoscope pour reprendre les mots de Baudelaire. Les différents lieux de l’exposition sont créés par montage, façon de voir, percevoir, comprendre le monde qui se révèle à cette époque en art, au cinéma, et qui est incarnée par la figure artistique du flâneur. Les dispositifs optiques,diorama, panorama, fantasmagorie et autres, développés au 19ème siècle, et souvent couplés au mouvement, comme le cinéma ou la chronophotographie, permettront d’établir une relation spécifique et privilégiée entre le visiteur et l’espace, entre le visiteur et les oeuvres.
Nous proposons un plan de ville, une déambulation aux travers rues et boulevards, un tissu fait de passages étroits, comme l’était et l’est toujours la morphologie urbaine de Paris, coupés par de grands boulevards, à la manière de ceux percés par le Baron Hausmann sur le tissu urbain parisien. Le visiteur déambule, se perd, se retrouve. Les parois tranchées par les boulevard révèlent des vitrines, sortes de dioramas contemporains qui mettent en scène la vie et les curiosités de la Belle époque parisienne. L’espace est défini par des parois abstraites de façon à mettre en scène les oeuvres, le son, la lumière. Les différents thèmes de l’exposition se déclinent en différents lieux. Pour les grands boulevards et pour chaque thème, une expérience lumineuse sera conçue. La lumière devient fil conducteur avec la rue. Les grandes artères (de l’exposition), les grands boulevards, sont largement éclairées, baignées d’une lumière plutôt froide et ponctuelle, donnée par de l’éclairage fluorescent —en contraste avec les passages étroits, qui eux sont éclairés de manière minimale par un éclairage plus chaud donné par l’incandescent. La lumière des réverbères électriques est réinterprétée par une série d’appareils créés au moyen d’ampoules Edison disposés de façon régulière, architecturale comme une infrastructure urbaine. Les grandes artères donnent une vue en perspectives sur des monuments, objets icônes de l’exposition. Des spectateurs lumineux déambulent à nos côtés. De part et d’autre du boulevard, les vitrines de magasins, façades de cafés, de théâtre et de cinémas, scintillent et illuminent les trottoirs. Sur le boulevard, le théâtre s’affiche, multitude d’ampoule de la marquise. Un cornet sonore sur le boulevard retransmet l’acte en cours. Un passage étroit, éclairé par un plafond lumineux, mène droit aux rues cachées des bordels. Un espace dessiné par des néons crée un espace baigné dans la couleur rouge, le Gai Paris. Certains des artéfacts sont regardés comme dans les peep-show, disposés dans un grand diorama caché (à la manière de l’Étant donné de Duchamp). De faibles lueurs laissent deviner leur présence derrière les parois opaques. Le flâneur y devient voyeur.